Wild Classical Music Ensemble au festival "L'Épopée Born Bad"à l'occasion des 10 ans du label Born Bad

Diffuseur
France Télévisions / Culturebox

Date
2017

Durée
5′

Réalisation
Christian Beuchet

Résumé

Comment faire face, aujourd’hui, à des personnes handicapées mentales, sans retenue, sans préjugés, sans que leur différence ne s’impose comme une barrière infranchissable ? En se confrontant directement à leur force créatrice, à leur énergie déployée sans retenue. Et quoi de mieux pour cela que la scène, lieu où le handicap cesse d’être un « moins » pour devenir un « plus » et permet enfin de révéler sans oeillères ni artifices d’exceptionnelles forces de caractère ?

Du groupe expérimental Les Harry’s au collectif hip-hop Choolers Division en passant par les projets protéiformes de l’Atelier Méditerranée (devenu BRUT POP), nombreuses sont les initiatives à avoir exploré ce sillon ces dernières années, suscitant l’intérêt d’un public pas toujours préparé au choc de la rencontre. L’une des plus mémorables a eu lieu au mini-festival Sur Les Rails, initié par l’Atelier Méditerranée à Paris en 2014. C’est là qu’une poignée de chanceux a eu la chance de découvrir le Wild Classical Music Ensemble : Linh Pham, Johan Geenens, Wim Decoene et Sebastien Faidherbe, quatre handicapés mentaux drivés par le musicien et luthier sauvage belge Damien Magnette, qui livreront ce soir-là, devant une assemblée littéralement pétrifiée, un concert brutal, sauvage, prométhéen.

Restait toutefois une question : comment retranscrire une expérience aussi physique et viscérale sur disque ? Et était-il même nécessaire de le faire ? Le premier album du groupe, sorti très confidentiellement chez Sub Rosa, était passé sous les radars et personne ne semblait bien savoir par quel bout prendre l’affaire. C’est pourtant pas moins de 6 labels (parmi lesquels Born Bad et Humpty Dumpty) qui se bousculeront pour publier en 2015 Tapping Is Clapping, nouveau LP plein de feu et de fureur, disque résolument « autre » qui balayera définitivement les derniers sceptiques en se faisant l’écho féroce de cette citation du  Voyage Au Bout De La Nuit de Céline :  « La grande fatigue de l’existence n’est peut être en somme que cet énorme mal qu’on se donne pour demeurer vingt ans, quarante ans, davantage, raisonnable. Pour ne pas être simplement, profondément soi- même, c’est à dire immonde, atroce, absurde. »

Et si en 2019 vous n’avez pas encore osé vous laisser pilonner par le rouleau-compresseur Wild Classical Music Ensemble, rassurez-vous : l’heure du rattrapage-express est enfin venue avec Tout Va Bien Se Passer, troisième album du Wild Classical Music ensemble et de très loin son plus accessible à ce jour. Mais attention, il n’est pas question ici d’accalmie, loin de là – en témoigne l’exceptionnel «  Bande De  », furieux concert d’invectives sur lequel Fabrice, le chanteur de Frustration, vient attiser une ambiance déjà étouffante. Plutôt de convergence, de rééquilibrage des flux, d’équipement plus maniable. De quoi rendre plus coloré et plus halluciné encore votre séjour dans cette dimension parallèle, orchestrée par les instruments-mutants de Damien Magnette (basse à percussion, mélodica d’outre-espace, micros déviants, boîtier d’effets transformés en theremin), spécifiquement conçus pour chacun des membres du groupe. Un pays de séismes étourdissants et de tempêtes triomphantes, peuplé de Talking Heads gélatineux («  Trainstation  ») et de Devo esquintés («  Autofile  »), où l’on danse sous fond de punk lunaire («  Carapace ») et de robot-rock hurlant (« Ik Ben Blij  »). Accrochez-vous au pinceau, on retire l’échelle. Ne vous inquiétez pas. Tout va bien se passer.

Lelo Jimmy Batista