Kim Fowley en interview"I'm A Bad Boy Who Does Nice Things."

Diffuseur
Le Drone

Date
Mai 2012

Durée
8′

Réalisation
Olivier Lamm

Résumé
Se frotter à la vie et la carrière de Kim Fowley, c’est un peu comme plonger la tête dans l’Outremonde du célèbre roman de Don DeLillo et reconnaître l’Histoire du rock pour ce qu’elle est jusqu’au fond de ses fibres: un vaste et vain champ de bataille jonchés d’une majorité de soldats inconnus gisant aux pieds d’une minuscule minorité de statues destinées à l’éternité.

De gré ou de force, le “Premier Maire du Sunset Strip” a tripoté comme frontman, homme de l’ombre ou businessman à tous les genres mais n’a jamais décollé des bas-fonds moites et empestés du rock – finalement pas une absurdité, puisque c’est là, sous le Strip, que le rock californien a vu le jour et conservé son identité.

Né en 1939 d’un père acteur (Douglas Fowley) et d’une mère top model, Kim Vincent Fowley a fait ses premières armes en manageant un groupe mineur où officiaient un certain Phil Spector et le futur Beach Boys Bruce Johnston (The Sleepwalkers), en fricotant dans la photo de charme puis en grouillottant pour Berry Gordy et surtout Alan Freed, inventeur à la fois du terme “rock’n’roll” et des filouteries spécifiques au genre puisqu’il échangeait passe-droits dans son émission contre les droits d’auteur des gamins noirs dans le besoin (Chuck Berry, Little Richard, ce genre de crevards).

Malin, avide, prêt-à-tout tel Nicole Kidman dans le film de Gus Van Sant, Fowley en a retiré sinon un horizon, son crédo de survivor: en être, à tout prix, peu importe l’odeur, peu importe le moyen. Mission accomplie un demi-siècle plus tard puisque son nom se retrouve sur un corpus absolument monstrueux et monstrueusement incongru d’albums souvent mineurs, quelque fois essentiels de l’Histoire, et même sur quelques hits pour son pote Skip Battin (futur Byrds et Flying Burrito Brothers), The Hollywood Argyles ou, de manière fameuse (coucou Hollywood), les Runaways.

Producteur, pygmalion, manager, compositeur, éditeur, maître de cérémonie, chanteur ou musicien, le Californien a produit les premières démos des Modern Lovers et les disques parmi les plus loose des Seeds, Blue Cheer ou Gene Vincent (I’m Back and I’m Proud, période grosses joues), accompagné Gram Parsons à la voix ou les Mothers of Invention à l’hypophone, composé pour les Byrds, Kiss, Warren Zevon, Alice Cooper, les Beach Boys ou Soft Machine. Dans Waiting for the Sun, sa somme sur la musique à Los Angeles, le journaliste anglais Barney Hoskyns n’est pas tendre avec Fowley, ses “arnaques et magouilles ” et surtout sa manie de réécrire sans cesse sa propre légende, mais son nom apparaît en moyenne toutes les deux pages.

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72 ans et un cancer de la prostate dans les dents, l’ex “Dorian Gray du rock’n’roll” a passé comme il se doit la majeure partie de ces dernières années à tester son pouvoir de séduction sur des filles de 40 ans ses benjamines et s’est déniché une dominatrice sympa du nom de Snow Mercy qu’il traîne partout autour du monde dans ce qui est sans doute une tournée d’adieu au monde des vivants. Rien de grandiose à part le triste boulot de la vieillesse, donc, mais c’est au moins le moyen de se rappeler de l’épilogue parlé du magnifique Living in the Streets (1971), dans lequel l’Américain résumait à l’avance, pour nous, la raison secrète de sa carrière  “Kim Fowley, the most amazing human being you’ve ever seen, or heard or thought about or hated. Let me tell you, I don’t need your love but I need your letters and recognition ’cause I like something dirty and under 30. And if you are blind and big breasted, you know where my interests lie“.